

... le nom d’Arago semble polariser une myriade de sujets, de questionnements et de songes. C’est pourquoi l’image d’une constellation a surgi pour lui rendre hommage. Une constellation de météorites qui s’articulerait et se développerait comme une sorte de sphère armillaire. Une constellation qui se camperait sur ce socle désolé, et qui telle une nébuleuse d’idées attraperait et retranscrirait l’ensemble des récits sonores qui nous parviennent depuis l’espace.
La sculpture se présente comme une sorte d’éclaté : un noyau central avec une masse importante est transpercé par des barres techniques qui ont été oxydées, et portent à leur extrémité d’autres noyaux d’échelle plus modeste. Ces noyaux sont travaillés comme des météores tirés en fonte d’aluminium brute, l’ensemble formant une constellation en amas ouvert. Il est important que la sculpture dans son entièreté donne le sentiment d’avoir toujours été à sa place. C’est une condition sine qua non pour que l’hommage à Arago perdure dans le temps et ne souffre pas de désuétude. L’ample structure a donc un aspect résolument brut et qui se confond avec le vert-de-gris qui recouvre d’ordinaire les statuaires classiques dans l’espace public. L’on dirait même qu’elle s’est plantée dans le socle de pierre, comme si sa course avait pris fin à cet endroit précis, centre névralgique et symbolique de l’attachement d'Arago à l’Observatoire de Paris. Puissante, avec une armature et des lignes de force marquées, l’étrange constellation emprunte donc à la fois au registre de la statuaire classique et de l’univers beaucoup plus obscur de l’astrophysique, dont elle semble s’être accaparé les bras articulés de certains instruments de mesure conçus par François Arago.
Il ne s’agit pas pour cette œuvre d’être unilatérale, il s’agit au contraire d’un faisceau d’indices, d’un nœud riche des différentes trajectoires qui ont parcouru la vie d'Arago. Mais elle doit également être un relais. La transmission avait une valeur toute particulière pour lui. Son œuvre posthume L’Astronomie Populaire en témoigne merveilleusement. Dans un second temps, est donc venue l’idée d’une sculpture qui pourrait avoir une fonction et donner des rendez-vous à ses visiteurs/regardeurs avec l’univers qui nous entoure et nous constitue. En effectuant quelques recherches, il est apparu que plusieurs programmes de l’Observatoire de Paris mettent en place des collaborations afin de donner accès aux données observées et enregistrées par les radio-télescopes. L’idée de faire de cette sculpture une antenne fonctionnelle et capable de relayer le son des étoiles et des comètes, s’est imposée comme une évidence.
En effet, quel plus beau compliment à François Arago qu’une sculpture qui murmurerait aux passants la mélodie de l’immensité dans laquelle il n’avait de cesse de plonger son regard pour mieux la comprendre et nous la livrer ? Quel plus bel hommage à cet homme et son attachement aux corps célestes et à leur scintillation, qu’un outil capable de délivrer leur chant, sans doute quelques années lumières après qu’ils ont déjà rendu leur dernier souffle ? Quelle plus belle perpétuation du souvenir de son intelligence riche et vive, sinon une oeuvre qui se charge des énergies transmises par notre univers, et s’en fait un relai de survivance, une mémoire active et accessible à tous ?